Il m’arrive parfois d’avoir des débats « hautement philosophiques » sur des expressions que j’emploie au quotidien. Le dernier en date fut sur la « puissance » d’un adjectif que je considère, selon la situation, comme affectueux : « idiot »…
Au cours de la conversation, mon interlocutrice, outrée de m’entendre citer cette ponctuation à tout vent, me dit employer « fada », beaucoup moins fort à son goût quant à son sens premier. Me rabâchant systématiquement sa référence au « Corbusier » illustre architecte pour lequel ce petit nom d’oiseau est inscrit dans l’histoire Marseillaise.
C’est ainsi que, têtue comme une mule, balançant entre continuer à dire « idiote » plutôt que « fadade », surtout pour ne pas mourir « bête », je suis allée chercher mon Larousse.
De fil en aiguille, j’ai appris un nouveau mot dont je ne suis pas prête d’oublier les déclinaisons : « l’idiotisme »…
Si comme moi vous vous sentez sur ce coup « ignare », oups, « ignorant », je vous propose d’en apprendre un peu plus sur sa signification.

Un idiotisme est une construction ou une locution particulière à une langue, qui porte un sens par son tout et non par chacun des mots qui la compose. Il peut s'agir de constructions grammaticales ou, le plus souvent, d'expressions imagées ou métaphoriques. Un idiotisme est en général intraduisible mot à mot, et il peut être difficile voire impossible de l'exprimer dans une autre langue.
Par exemple, en français « il y a » est un bon exemple d'idiotisme non « imagé » couramment utilisé : décomposé mot à mot cela n'a pas de sens, alors que cela signifie bien quelque chose pour qui connaît la formulation en elle-même.
« Couper l'herbe sous les pieds » est un autre exemple, s'agissant cette fois d'une expression imagée qui peut être utilisée métaphoriquement telle quelle dans un autre contexte que celui qui lui a donné naissance (et donc avec une autre signification que celle de couper effectivement de l'herbe sous le pied). Une telle expression sera totalement incompréhensible si elle est traduite mot à mot dans une langue étrangère ; de même, un anglophone proposant qu'on se « secoue les mains » au lieu de se « serrer la main » commettra un « anglicisme ».
Idiotisme animalier
Un idiotisme animalier utilise des expressions renvoyant aux animaux ou à des choses relatives aux animaux (comportement, parties du corps, etc.) ; par exemple, « du coq à l’âne » qui signifie d'un sujet à un autre sans transition ni rapport.
Les idiotismes animaliers sont en grande partie apparus dans les milieux de l'agriculture et de la chasse, aux époques où ceux-ci étaient prépondérants dans les activités d'une bonne partie de la population ; ils peuvent également faire référence aux animaux de compagnie.
Idiotisme botanique
Un idiotisme botanique est en rapport avec les végétaux ; par exemple, le fait de « faire chou blanc » qui signifie échouer.
Idiotisme chromatique
Les idiotismes chromatiques utilisent les noms des couleurs, comme par exemple le fait de « laisser carte blanche » qui signifie autoriser à prendre toute initiative jugée utile.
Idiotisme corporel
Un idiotisme corporel se rapporte à une partie du corps (notamment du corps humain), comme par exemple le fait de « prendre ses jambes à son cou » qui signifie partir précipitamment.
Les idiotismes gastronomiques
utilisent des termes liés à la nourriture, l'alimentation et la cuisine comme métaphore ; par exemple, « les carottes sont cuites » qui signifie que la situation est sans espoir. Leur grand nombre s'explique par l'importance de ces domaines, de tous temps, dans la plupart des populations.
Idiotisme numérique
Un idiotisme numérique fait intervenir un ou plusieurs nombres, par exemple « se mettre sur son trente-et-un » qui signifie soigner particulièrement son apparence (toilette, habillage, etc.). Cette expression se rapporterait au réveillon de la Saint-Sylvestre (la nuit du 31 décembre au 1er janvier); il est en effet très largement répandu que, s'il est une soirée par an pour soigner sa tenue, c'est bien le réveillon du nouvel an.
Idiotisme toponymique
Un idiotisme toponymique fait intervenir des noms de lieux ou nationalités, comme par exemple « filer à l’anglaise » qui signifie partir discrètement.
Idiotisme vestimentaire
Un idiotisme vestimentaire utilise du vocabulaire lié aux vêtements, comme par exemple « mouiller sa chemise » qui signifie s'impliquer personnellement dans un projet.
Langages utilisant des idiotismes
Tout comme l'argot, les idiotismes imagés permettent de parler de quelque chose sans le nommer explicitement. De ce fait les idiotismes sont particulièrement nombreux dans les thèmes de langage plus ou moins illégaux (argot des voleurs par exemple), tabous ou à l'encontre de la morale ou de la bienséance (langage érotique par exemple).
L’idiotisme…
Cette locution valait bien que l’on en fasse « tout un fromage » sans doute !
Nathalie
Le plaisir d’écrire